"Le Soi n’est plus à même d’appréhender l’autre homme dans son essence libre : « nul ne pressentait l’humain en tant qu’humain en l’autre, chacun ne le sentait immédiatemment que dans le soi propre (…) le monde dans son entier restait au dehors. S’il l’avait en lui, ce n’était pas comme monde mais seulement comme son bien propre ». C’est d’abord en moi que je sais appréhender cette altérité qui fait le prochain, l’autre homme selon Kant ; c’est en tant que je perçois l’humanité en moi et que j’ai la conscience immédiate de ma liberté pure, que je peux le pressentir en autrui. Mais l’humain en tant qu’humain n’est pas qu’un. Il est cette part du prochain qui échappe, en dernière instance, à l’universalisation. C’est autrui dans son altérité radicale, le prochain dans son hétérogénéité, qui va me mettre face à l’humain. « … car il n’y a plus personne qui soit là en dehors de lui. Le Soi est l’homme solitaire au sens le plus dur du mot».

Quatrième de couverture :
« On conviendra aisément qu'il importe au plus haut point de savoir si l'on n'est pas dupe de la morale. La lucidité - ouverture de l'esprit sur le vrai - ne consiste-t-elle pas à entrevoir la possibilité permanente de la guerre ? L'état de guerre suspend la morale ; il dépouille les institutions et les obligations éternelles de leur éternité et, dès lors, annule, dans le provisoire, les inconditionnels impératifs. Il projette d'avance son ombre sur les actes des hommes. La guerre ne se range pas seulement - comme la plus grande - parmi les épreuves dont vit la morale. Elle la rend dérisoire. »
Levinas défend l'amour du prochain en reprenant l'héritage chrétien et il le fait à travers l'altérité.
"Nous sommes le Même et l'Autre. La conjonction et n'indique ici ni addition, ni pouvoir d'un terme sur l'autre." Page 28
"Le discours, du fait même qu'il maintient la distance entre moi et Autrui, la séparation radicale qui empêche la reconstitution de la totalité, et qui est prétendue dans la transcendance, ne peut renoncer à l'égoïsme de son existence, mais le fait même de se trouver dans un discours, consiste à reconnaitre à autrui un droit sur cet égoïsme et ainsi, à se justifier. L'apologie où le moi à la fois s'affirme et s'incline devant le transcendant, est dans l'essence du discours. La bonté à laquelle le discours - comme nous le verrons plus loin - aboutit et où il requiert une signification - ne perdra pas ce moment apologétique." Page 29
"L'existence de l'homme demeure phénoménale, tant qu'elle reste intériorité. Le langage par lequel un être existe pour un autre, est son unique possibilité d'exister d'une existence qui est plus que son existence intérieure. Le surplus que comporte le langage par rapport à tous les travaux et les œuvres qui manifestent un homme, mesure l'écart entre l'homme vivant et l'homme mort, le seul cependant que l'histoire - qui aborde objectivement dans son oeuvre ou dans son héritage - reconnaisse. Entre la subjectivité enfermée dans son immensité et la subjectivité mal entendue dans l'histoire, il y a l'assistance de la subjectivité qui parle." Pages 199 et 200.
Dans l'ouvrage de Danielle COHEN-LEVINAS et Alexander SCHNELL, à la page 53 : "Comme Levinas l'annonce dès le début, il est probable que la relation métaphysique n'ait pas à s'énoncer en termes négatifs ou positifs : au fond, elle s'énonce dans le langage lui-même, dans le simple fait de parler, qui n'est en lui-même ni affirmatif, ni négatif - mais adresse.
"L'être est un monde où l'on parle et dont on parle. La société est la présence de l'être " Emmanuel Levinas in Totalité et Infini
Relire Totalité et infini d'Emmanuel Levinas / Danielle COHEN-LEVINAS, Alexander SCHNELL.- Paris : Editions Librairie Philosophique J. Vrin, 2015.- 196 p.- (Problèmes et Controverses)
ISBN : 978-2-7116-2567-3
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